Une promenade sur la berge

Comment se faisait-il que le Maître des Arcanes était là ? Peu de membres de l'Ordre le voyaient quitter ne fut-ce que sa Tour, mais alors le Château ?! Et pourtant, il avait parcouru une multitude d'Univers et vu un tas de choses... Autrefois. Son passé, il préférait le garder pour lui. Et seuls quelques uns le connaissaient. Mixal, par exemple. Le petit empereur et lui-même avaient fait un bout de chemin ensemble, on pourrait dire qu'ils étaient le noyaux du groupe. Les deux premiers Maîtres à s'associer. Et chacun sauva la vie de l'autre plusieurs fois. Les deux furent des fugitifs, poursuivis par leurs semblables et de divers ennemis qu'ils eurent la bonne idée de se faire en route, avant de devenir des seigneurs paisibles, rangés à l'écart de l'agitation générale des Mondes.

Les mains dans le dos, la cape noire au vent, l'ensorceleur drow se promenait le long de l'eau, regardant au loin. Le potentiel de ce monde n'a pas encore été exploité. Il y avait moyen de créer encore des tas de choses. Un gigantesque espace, une plaine interminable s'étendait au-delà de l'eau. L'elfe noir sourit. Dans son imagination, tout se construisait et s'effondrait pour réapparaitre encore plus réussi... Il faudrait en parler aux autres.

A l'Ombre des arbres, pour éviter la lumière du soleil couchant, il respira profondément, dans cette belle et fraiche soirée.

[HRP: Désolé, je ne suis pas sur que cette semaine sans RP m'ait aider à me remettre en selle dans ce domaine ^^]

Le soleil semblait entamer sa descente dans l'horizon, laissant peu à peu sa place à un ciel plus sombre où, bientôt, allait s'élever une magnifique lune qui bercerait le monde de sa faible mais douce clarté. Mixal appréciait observer le ciel, surtout à ce moment de la journée. La nuit était pour lui source d'inspiration. Inspiration pour quoi, cependant? Même l'assassin ne le savait pas. Il ne s'agissait pas d'une inspiration artistique, ni même d'une inspiration lui permettant de s'adonner aux plaisirs de la création de nouveaux sorts ou nouvelles techniques de combat. Il s'agissait d'autres choses. Peut-être que cela lui permettait de mieux se connaître, de se trouver une façon d'avancer dans la vie. Qui sait?

Cette fin de journée lui donnait envie d'un petit peu se déplacer. Pas qu'il ne bougeait jamais de sa chambre, au contraire. Il avait l'habitude de monter sur les toits des différentes tours, simplement parce qu'il s'y sentait bien. Il était aussi très loin d'être asocial, lui semblait-il. La seule chose était qu'il devait sembler bien peu intéressant aux yeux d'autres personnes. La plupart des gens montraient sans cesse leurs émotions, ce qui donnait un rythme aux conversations. Bien entendu, cela ne signifie qu'il faille à tous prix montrer des tonnes de sentiments et d'affection pour être intéressant. Certains maîtres en étaient un parfait exemple.

Enfin... Ces pensées menèrent le Suniage petit à petit vers l'une des sorties du château, ne sachant en aucun cas où l'emmèneront ses pas. Cela n'avait aucune importance, après tout. Depuis que l'Ordre avait été créé, les différents maîtres avaient désormais tout le temps et la quiétude nécessaire pour leurs activités et même plus. Cela valait évidemment pour chaque habitant du château, cependant on pouvait être tenté de croire que les maîtres avaient eu encore moins d'occasions de profiter de ce genre de vie que les autres. Un indice à propos de cela? Le fait qu'ils aient ressenti le besoin de créer ce lieu peut-être.

Visiblement, l'inconscient de Mixal voulait faire une petit visite aux abords du lac. Il s'agissait de l'un de ces endroits emprunts d'une part de mystère, agréables à parcourir. Le soleil qui disparaissait peu à peu ainsi que le léger vent rendait l'ambiance tout simplement parfaite.

Au gré de ses déambulations, le Suniage vit l'un des autres maîtres de la tour, et aussi ami par la même occasion. En fait, le maître le plus important du château, peut-être. Avec Denehbe et Rifou probablement. Parce qu'eux seuls avaient eu le pouvoir de créer ce monde. Mixal et Shade n'avaient bien entendu pas été en reste, mais ils avaient participé bien plus activement à la création de l'ordre en lui-même plutôt que du monde. Bref... Cela n'était pas réellement intéressant, même aux yeux de l'assassin lui-même.

Le jeune Suniage s'approcha lentement d'Alarin, sans aucun bruit, à son habitude. Il ne dit aucun mot, préférant laisser tranquille le Drow, dans le cas où celui-ci serait occupé. Il n'appréciait pas faire sortir les gens de leurs réflexions, ou méditation ou autre chose de ce genre. Chose qu'il n'appréciait pas qu'on lui inflige par la même occasion. Voilà donc pourquoi il garda le silence, se plaçant simplement à coté de celui avec qui il partagea de nombreux moments sur d'autres mondes, regardant dans la même direction que lui.

Alors que le soleil couchant faisait danser sur le Lac des reflets dorés, Alarin sentit une présence. Il n'était pas difficile de l'identifier comme celle d'un maître, juste avant de deviner duquel il s'agissait. Ils avaient appris à se reconnaitre entre eux. L'Oracle lui donnait des frissons, Shade était entouré d'un aura de joie et d'amabilité qui, bien que pas désagréable, ne convenait pas toujours au drow. Rifou, quant à lui était le plus apaisant et savait enflammer le désir du drow en un clin d'œil.

Mixal... Oui, Mixal. Il procuré à l'ensorceleur un sentiment de sécurité. A ses côtés, Alarin oubliait bien vite sa propre faiblesse physique. Frères d'armes, ils se complétaient à merveille. La magie et les connaissances de l'un, conjugués à la rapidité, la force et la précision de l'autre, en plus de leur discrétion commune, faisaient d'eux des adversaires redoutables. Bien entendu, seul un groupe composé des Cinq pourrait se prétendre parfaitement complet et quasi-invincible, mais ces deux-là étaient déjà très dangereux.

Le Suniage appréciait le calme, lui aussi. C'était sans doute le résultat d'une longue vie de troubles et de péripéties. Et c'est cela qui le rendait si agréable. Ils se comprenaient en peu de mots, voire sans. Ils restèrent donc ainsi, à contempler le lointain horizon, sans parler. Combien de temps ? Impossible de le savoir. Mais ils n'étaient pas pressés. Rien ne les empêcherait d'y passer la nuit.

Et ils n'eurent pas besoin de se saluer pour rester polis. Au contraire, c'est cet respect et ce silence qui rendaient bien mieux leur amitié. Alarin se pencha vers l'onde pour y apercevoir un poisson très coloré le regarder et disparaitre rapidement. Il sourit. Rifou avait vraiment de l'imagination. Ou alors avait-il donc vu tous les être qu'il créa ici ? Les avait-ils amenés jusqu'à ce monde ? Oui, pour certains. Afin de les sauver de l'extinction ou parce qu'il appréciait leur compagnie. C'était son genre.

Enfin, brisant le silence, rythmé par le léger chuchotement des petites vagues contre la berge, Alarin prit la parole de son murmure habituel :

"A quoi penses-Tu, mon ami ?"

Il n'y avait pas besoin de préambules, le silence fut une introduction suffisante pour cette conversation qui allait peut-être avoir lieu.

Mixal ne sut jamais combien de temps dura le silence qui regnait entre lui et Alarin. Et le Drow ne devait pas connaître cette durée plus que le Suniage. Quelle importance cela pouvait-il avoir, après tout? Les longs discours inutile, les anecdotes un peu stupides racontées pour meubler ou même, dans de nombreux cas, des inepties grosses comme le monde n'avaient pas leur place ici, et n'étaient bonnes que pour ces gens qui ressentaient le besoin de prendre le dessus sur celles et ceux à qui leurs mots étaient adressés. N'était-ce pas une forme de nombrilisme, dans le calme et le silence ambiant, que de vouloir se faire remarquer pour prendre la parole alors que l'on a rien à dire? Si encore les mots prononcés avaient un caractère intéressant ou utile...

Le silence était bien plus différent, et réconfortant en quelques sortes. Surtout celui qui était créé entre Mixal et Alarin, ou en moindre proportion avec les autres maîtres du château. Il était source de questionnements et de rapprochement avec l'autre, permettant de se mettre en confiance. Savoir délecter le calme et le silence prouvait une grande force intérieure, et un grand intéressement envers ses pairs, bien que cela semble prouver le contraire. Rester en silence, c'était savoir respecter la bulle personnelle des gens, leur intimité.

Le Suniage fut sorti de ses pensées, aussi futiles étaient-elles, par le mouvement du Maître de la Tour des Arcanes, se penchant pour observer l'eau ainsi que les êtres vivants qui la peuplaient. Enfin, un plus particulièrement. Un magnifique poisson coloré. Sans vraiment voir son visage, Mixal savait qu'Alarin souriait. Comme à peu près chaque fois qu'il observait ce qui avait été "touché" par la main de Rifou. Etait-ce de par la relation qui liait l'Esprit de la Nature et le Drow que naissait ce sourire, ou pouvait-on déceler derrière ce visage un peu plus radieux une certaine admiration envers cet être qui amena des formes de vies aussi pures et magnifiques sur ce monde? Ca, Mixal n'en a jamais eu la réponse. Mais il se mit à sourire lui aussi, sans trop savoir pourquoi.

Peu de temps après, Alarin brisa le silence. Mais ce n'était pas à la manière de ces égocentriques, loin de là. Tout d'abord, il n'avait pas l'habitude de parler pour ne rien dire, et tout ne se rapportait pas à lui. Ensuite, il connaissait le moment exact où il fallait se mettre à parler. Savoir briser le silence juste au moment opportun était une qualité rare, et le Drow en avait le secret, semblait-il. En était-il pareil pour tous les membres de sa race? Il s'agissait-là d'une autre question à laquelle Mixal ne pouvait apporter de réponse pour l'instant.

Il répondit alors d'une voix calme, un léger sourire sur les lèvres:

"Oh, à rien grand-chose. Beaucoup de banalités. De ces questionnements un peu sans intérêts sur diverses situations, rien de plus. Comme sur la création de ce monde. Rien de bien important. En fait, j'aimerais surtout savoir ce que tu fais ici à cette heure-ci. Tout est magnifique dans les alentours, mais cela ne semble pas être dans tes habitudes. Y a-t-il quelque chose qui te tracasserait?"

Après ce silence, si finement décrit plus haut, les deux hommes échangèrent quelques paroles. La réponse de Mixal, fit qu'Alarin tourna lentement la tête vers son ami, le regardant par-dessus ses lunettes. Il sourit. Puis, son regard balaya l'entièreté du paysage qu'il pouvait apercevoir sans avoir à bouger la tête. Une merveille. Non de part sa beauté, d'autres Mondes étaient bien plus magnifiques dans les apparences. Mais c'était à eux. C'étaient eux, les Cinq, qui l'avaient conçu et fabriqué.

"La création de ce Monde n'est pas une banalité voyons ! Au contraire ! C'est très important, mon ami..."

Un rire, clair et bref, suivit ces paroles. Il comprenait le fond de ce que le suniage voulait dire, mais la formulation était une perche tendue pour sa remarque. La question qui suivit, fit que le drow redevint sérieux et se retourna vers l'immensité paisible du lac. Oh, il venait se promener, ici ou ailleurs, d'une façon assez régulière. Souvent dans l'espoir de se retrouver plus seul que cela ne lui était possible dans la Bibliothèque... Non que Mixal le dérange. Au contraire, il était bien agréable de passer un peu de temps avec lui.

"Non... Rien de plus que d'habitude... Hmm... Le passé... Mais tout va bien."

Pas besoin d'être plus précis. Les deux savaient ce que l'autre avait enduré. Nulle nécessité de s'attarder dessus ou l'expliquer. Le Château était un refuge physique. Quant au mental, chacun avait à s'en fabriquer un. Et Alarin avait du mal avec cela. La présence de ses amis, en particulier celle de Rifou, l'aidait. Mais ce n'était jamais suffisant. Alors il fit ce que les drows font si bien : il commença à se faire souffrir, à y penser souvent, se remémorant chaque détail de ses aventures, plus ou moins joyeuses. Et ça lui faisait du bien, tout en le plongeant dans cette mélancolie qu'on lui connaissait si bien.

"Ne t'inquiètes pas. Si on changeait de sujet ?"

Rien de tel que l'honnêteté, n'est-ce pas ? Ainsi, l'ensorceleur plaça cette question en toute sincérité, dont il pouvait faire preuve à l'égard de Mixal. Avec un autre, il aurait pris la peine d'être plus diplomate. Entre amis, cela n'avait pas lieu d'être. Et le sujet était tout désigné. Le drow y avait déjà pensé, avant l'arrivée du Maître assassin.

"Que penses-Tu d'agrandir notre œuvre, mon ami ?"

[HRP: Désolé du temps que j'ai mis pour cette réponse, mais je n'ai pas été en état avant maintenant ^^"]

Alarin affirmait que la création du monde sur lequel ils se trouvaient en cet instant n'était pas une banalité. Et il avait plus que probablement raison, Mixal le savait bien. Ce monde était un endroit très important pour plusieurs personnes, ayant quelque peu modifié le cours de leurs vies, et qui allait le devenir encore plus, pour encore plus de gens. Du moins, c'est ce que le Suniage espérait, tout comme les autres maîtres probablement. L'oeuvre de toute une vie, qui allait permettre à d'autres de continuer la leur dans un plus grand calme et une plus grande sagesse. Ce que l'assassin voyait de plus "secondaire" était la façon dont avait été créée le monde. Cela n'avait rien de secondaire ou de banal, bien sûr. Mais il s'agissait du passé, et il pensait qu'il fallait plutôt se concentrer sur la façon dont évoluerait ce monde et ses habitants plutôt que de la manière dont il était apparu. Bref... Le Drow avait surement compris cela dans les grandes lignes, si ce n'était parfaitement. Cela expliquait pourquoi il avait eu un court rire après avoir parlé. Le jeune maître se rendit compte du fait de s'être mal exprimé et un petit sourire de légère gène se dessina sur son visage, accompagnée d'un bref mouvement fuyant de son regard.

Le sérieux réapparut vite chez le Maître des arcanes, et il y avait de quoi. N'importe qui perdrait toute sa bonne humeur, même le plus bienheureux des être vivants existant dans l'univers, en repensant à ce que Mixal ou Alarin avaient pu traverser comme épreuve. En tant que Drow, cela n'affectait probablement pas autant le maître de la tour des Arcanes autant que cela pouvait le faire pour un autre, recherchant possiblement du plaisir à se remémorer ces souvenirs qui, même s'ils étaient agréables pour quelqu'un qui avait un grand esprit d'aventurier, restaient tout de même très douloureux sous de nombreux angles. Mixal se mit alors à, peu à peu, se remémorer les souvenirs de cette époque mais fut cependant rapidement coupé, et heureusement peut-être, par le projet d'Alarin.

"Agrandir ce monde? A vrai dire... Je n'y ai jamais pensé. Enfn, si, bien sûr que si. Je veux dire, je n'ai jamais pensé à quoi rajouter à ce monde. Nous avons ce qu'il nous faut pour nous loger, nous avons des environnements capables d'accueillir des milliers de formes de vies, si pas des millions... Le château est assez grand pour accueillir un grand nombre de voyageurs égarés cherchant refuge, nous avons tout ce qu'il faut pour leur permettre de suivre un entraînement physique, magique, mental et spirituel, peu importe ce qu'ils désirent faire... Non, je n'ai jamais trouvé quoi rajouter à ce monde. Mais l'idée est, bien sûr, tout à fait intéressante. Mais... Tu y as déjà énormément réfléchi, n'est-ce pas?"

Mixal n'avait pas tort. Grâce au travail de tous, ce Monde était devenu un lieu de renommée en ce qui concernait la formation d'aventuriers et de refuge. N'importe qui pouvait s'y sentir comme chez lui et progresser avec l'aide et les connaissances des Cinq. C'était indéniable. Mais une fois qu'ils aient fait et stabilisé tout ce qui concernait l'Ordre, la situation stagnait un peu... Le calme était une chose fort précieuse pour le drow. Cependant, la frontière entre le calme et la routine était très fine et facile à franchir. Et aucun mage n'aime la routine. Le progrès, si lent soit-il doit avoir lieu. La vie sans évolution, c'est déjà une forme de mort.

"Je pense que notre évolution doit être plus... poussée que de nouvelles fleurs chez Rifou ou de nouveaux monstres chez l'Oracle. Même des ouvrages inconnus dans ma Bibliothèque ou des armes à l'Armurerie ne pourront satisfaire le potentiel que nous avons encore. Les ressources du Sanctuaire sont suffisantes pour aller envahir plusieurs univers... Quant à ce que je propose d'en faire..."

Souriant, en partie à l'idée de conquêtes et de nouvelles guerres, où il pourrait pleinement faire valoir ses talents et sa formation d'ensorceleur de guerre, Alarin plongea encore son regard dans les insondables eaux du Lac. Mais surtout à cause du projet pharaonique qu'il imaginait déjà. En un temps ridicule, Alarin et les autres Maîtres étaient parfaitement capables d'édifier...

"...une ville ? Que dirais-Tu d'une ville pour tout être qui n'aimerait pas se battre, mais juste vivre dans une contrée paisible et tolérante ? La présence de l'Ordre fait que personne n'oserait menacer un peuple quelconque. Et puis... Le trafic tant marchand que culturel est toujours favorable à l'apprentissage que ce soit le nôtre ou celui de nos élèves. N'est-ce pas ?"

» Promenade en soirée [Libre]
» Petite promenade dans le jardin